« Arès, peut-être pouvons-nous accompagner nos chères cousines à leurs appartements ? Ils sont de toute façon sur la route pour aller aux miens. » Je hochais la tête alors que mon frère prononçait ces mots. Bien entendu, nous allions jouer le rôle de guide et de gardien pour les soeurs Adeney. Il ne fallait pas qu'un quelconque malheur ne leur arrive sous notre garde. Soudain, Eleanor attrapa son bras et elle s'écria qu'elle voulait aller admirer les fleurs de l'hiver. « J’ose espérer mon cher Arès que tu ne comptes pas me laisser seule admirer la beauté de ces fleurs. » J'allais m'épandre en diplomatie et lui répondre que rien ne m'enchanterait plus, et je le pensais. Mais elle ne m'en laissa pas le temps, et m'attira loin de nos fratries.

Je la laissais me guider jusqu'à l'endroit du petit jardin, jardin que je connaissais bien, et elle aussi, à en juger par la sûreté de ses pas. Elle semblait savoir exactement où aller. Nous arrivions bien assez tôt près du petit jardin étroit que je chérissais tant en étant enfant. Elle me lâcha et s'aventura de quelques pas un peu plus loin. Je gardais mes yeux sur elle. Sa vivacité et sa spontanéité me firent sourire, rappelant à ma mémoire des souvenirs chéris et enfouis trop profondément de notre enfance à tous les deux, des délicats moments que nous avions passé ensemble. Trop peu. Et trop lointains. Une fleur légère, teinte d'un violet aussi délicat que profond attira mon regard, et tandis qu'Eleanor virevoltait parmi les bougeons, je me penchais pour a cueillir, avant de la dissimuler derrière mon dos.

Elle m'adressa la parole, et sa voix sembla résonner et réverbérer sur la neige fraîche. « Tu ne dis rien. Aurais-tu perdu ta langue ? » Je ne pus m'empêcher de sourire à nouveau, sentant un léger pincement au coeur. Elle se tourna vers moi, me fixant intensément, avec un air espiègle et charmeur. Je lui retournais le même regard, pendant un moment, avant de m'avancer vers elle, faisant crisser mes bottes sur la neige. Je m'arrêtais à sa hauteur un instant, et lui tendis la fleur avec un geste lent. J'étais simplement subjugué. Elle m'avait tant manqué. Et là, à contre jour, dans la lumière du soleil, elle ressemblait plus à un ange qu'à une simple mortelle. Si pour l'instant je ne pensais qu'à la chaleur de ses mains et à la douceur de ses lèvres, je tentai de ne pas me laisser ensorceler si facilement. C'était un défi, une sorte de jeu, entre nous. Ca l'avait toujours été. Même si à présent, c'était réel. Un sourire éclaira son visage, et à nouveau, j'oubliais ce que je voulais lui dire. « Ton sourire vient de me dérober mes mots. » lui dis-je, le sourire aux lèvres ,et pourtant on ne peut plus sérieux. Je lui offrais mon bras, et nous marchions un petit peu. « Comment vas-tu ? »